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Carnet Aide à la jeunesse 2017

GénérationS AMO
«des racines et des ailes»

Méthodologie du projet

Productions des ateliers

I. Montée en puissance du travail en réseau, quid du partenariat ? -Groupe de Mons

II. Le milieu de vie : les NTIC, le travail de rue... un milieu en mutation -Groupe de Liège

III. Les AMO, alternatives à l’hébergement ? -Groupe de Bruxelles

IV. Pauvreté et précarité, quelle approche en AMO ? -Groupe de Namur

Conclusion

 

Carnet2017 

Introduction

   

Au quotidien, chaque service AMO, chaque travailleur social au sein de son service, est aujourd'hui amené à devoir se définir, se positionner, se démarquer par rapport à un environnement sociétal et institutionnel en grande mutation. La diversité des environnements institutionnels avec lesquels l’aide en milieu ouvert est en lien et la multiplication des contextes qui mobilisent la dynamique socio-éducative d’aide aux jeunes témoignent à la fois de l’importance, du sens et de la force de l’action menée au sein des services AMO, mais permettent également d'en pointer l'extrême complexité et parfois la fragilité.

Aujourd’hui, peut-être plus qu’hier, il nous apparaît nécessaire et important de mener un partage d’expériences et une réflexion collective à propos des « fondamentaux » du métier sur lequel le travailleur social en AMO appuie son travail.

A l’initiative de 3 fédérations (ANCE,FIPE et FISSAAJ), le projet « GénérationS AMO » s’est donné pour objectif de mobiliser les équipes des services AMO dans une quête de sens autour de fondamentaux partagés qui constituent en quelque sorte l’ADN de l’action des AMO.

Revenir aux fondamentaux semble évident, non pas dans un réflexe conservateur mais bien pour contextualiser la spécificité associative de l’AMO et ainsi renforcer son identité institutionnelle.

Pour enrichir cette démarche, nous avons estimé important de tenir compte de l’historicité des AMO et du secteur de l’aide à la jeunesse étant entendu que ces services plongent leurs racines dans des terreaux multiples, constitués d’analyses de terrain, de combats, de revendications ou d’interpellations diverses, de valeurs et de mobilisations collectives… dans un espace temps donné.

Jeter un regard sur le passé pour mieux comprendre les enjeux actuels et se projeter dans le futur, telle est l’intention de la démarche « Générations AMO ».

Ce travail de quête de sens répond également au souci de pouvoir transmettre les éléments constitutifs de l’identité de l’AMO au-delà de l’historicité des travailleurs, des équipes, des services et du secteur de l’Aide à la jeunesse, au-delà de la diversification des moyens d’actions mobilisés par les différents services.


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 La méthode

   


Le groupe porteur qui pilote la mise en œuvre du projet bénéficie de l’appui méthodologique d’un organisme de formation agréé, RTA, et du soutien financier du fonds ISAJH.

La méthodologie suivie pour la mise en œuvre du projet a été balisée dès le départ par quelques principes :

  • le processus se devait d’être participatif et mobilisateur d’un maximum de travailleurs des équipes AMO ;
  • le processus devait se concevoir dans un timing raisonnable permettant de se donner le temps sans toutefois diluer la dynamique ; la durée retenue étant d’une année ;
  • la méthodologie suivie devait être soutenable pour les équipes ;
  • il était essentiel de tenir compte de la diversité des AMO (caractéristiques de l’équipe, zone géographique rurale ou urbaine, spécificité du projet pédagogique, etc.) ;
  • la méthodologie se devait de respecter le principe d’homologie avec la logique d’action des services ;
  • il était important de rester centré sur les enjeux actuels et de nourrir la réflexion des expériences « historiques », et non l’inverse ;
  • une attention particulière devait être accordée au fait de distinguer les enjeux organisationnels propres aux services et au secteur et les enjeux de société que leur travail rencontre.

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 Les différentes phases du projet

   

 

Etape 1
Recueil de données

Durant cette étape, il s’agissait de recueillir des données auprès de toutes les équipes des services AMO dans l’intention de constituer une ligne du temps qui permette d’identifier des témoins et des lieux clés pour la production de séquences vidéos de soutien au travail en atelier. Il s’agissait en quelque sorte de retracer l’histoire des AMO avec les personnes qui l’ont faite. Ce recueil de données a été réalisé par un questionnaire adressé à tous les services AMO.

 

Etape 2
Analyse des réponses au questionnaire,
détermination des thématiques émergentes
et réalisation de capsules vidéo

Une analyse des réponses reçues a permis de déterminer 4 problématiques émergentes : la précarité des jeunes et des familles, le travail en réseau et le partenariat, le milieu de vie et l’AMO comme alternative à l’hébergement et à l’institutionnalisation. Les questions transversales sont celles qui interrogent l’identité de l’AMO, les valeurs, les principes d’action et les « fondamentaux » qui animent actuellement les équipes.

Une fois la ligne du temps constituée et les témoins clés définis à partir des réponses au questionnaire, des visites de terrain ont été réalisées par l’équipe de RTA, en étroite collaboration avec le groupe porteur. Celles-ci ont été filmées afin de rendre les interviews des « fondateurs - témoins clés » accessibles au plus grand nombre.

Chaque capsule remet en perspective le témoignage d’un témoin clé, identifié comme tel par les répondants au questionnaire, avec une thématique. Ces témoignages illustrent celle-ci tout en abordant certaines controverses internes/externes apparues au sein du secteur (cf. les tensions avec les contrats de sécurité…), ou encore des alliances externes constructives.

Etape 3
Ateliers thématiques décentralisés

Quatre ateliers ont été organisés en fonction des thématiques émergentes ; les capsules vidéo correspondante à la thématique ont servi d'amorce au débat :

Dans un premier temps, pour lancer les échanges en introduisant le fil historique, les capsules vidéos ont été diffusées et mises en débat lors de la première demi journée de travail collectif. Ensuite, à partir des témoignages « clés », les échanges ont porté sur les expériences, les questionnements, les résonances qui se posent aujourd’hui au regard des actions mises en œuvre, et enfin les fondamentaux et points de tension concernant la problématique abordée.

 

Etape 4
Carnet Aide à la Jeunesse


Les apports des services via le questionnaire ainsi que les échanges lors des ateliers furent riches. C’est pourquoi nous avons décidé de réaliser ce Carnet sur le site Internet d’Intermag (RTA). Ce Carnet est composé d’une partie écrite, notamment avec les fondamentaux et quelques points d’attention, mais aussi des capsules vidéo réalisées pour chacune des thématiques.
Une matinée de présentation de ce Carnet a été prévue le 8 juin 2017.


     


 4 CAPSULES

 


4 ATELIERS


1/ Montée en puissance du partenariat
  

 

Durée de la capsule : 13’45

Témoin : Yves Ferdin, directeur AMO La Rencontre (Mons)

Interlocuteur : Gaëlle Debay, AMO Arpège (Tertre)

Lieu : la Cité du Coq à Jemappes

      
 

Lieu/Date  de l'atelier : Mons; les 13/10 ; 15/11 ; 16/12

Participants : Agora Jeunes, Amosa, Ancrages, Arpège, CEMO, Culture Jeunes Chamase, Graine, Jeunes 2000, Mic-Ados, Parler pour le dire, Passages, Point jaune, Le Déclic, Atouts Jeunes, Canal J/

Personnes ressources du groupe porteur : Gaëlle Debay (AMO Arpège) et Didier Deleruelle (AMO Graine)


2/ Le milieu de vie : les NTIC, le travail de rue, ... un milieu en mutation
  

 

Durée de la capsule : 16'14

Témoin : Pierre-Philippe Marchand, administrateur délégué de l'AMO CLAJ, Stéfan De Buyser, AMO Dinamo

Interlocuteur : Christian Lasseaux, directeur AMO CIAJ

Lieu : le quartier du Carré à Liège

      
 

Lieu/Date de l'atelier  : Liège, les 20/09 ; 26/10 ; 22/11

AMO Participantes : Ancrages, Arkadas, Arpège, La Particule, Droit des jeunes – Liège, Dynamo, Jeunes 2000, La Boussole, La Teignouse, Mic-Ados, Passages, Point jaune, SOS Jeunes, ANCE

Personnes ressources du groupe porteur : Audrey Joris (Fédération ANCE), Corinne Lefebvre (Droits des Jeunes) et Stéfan De Buyser (AMO Dinamo)


3/ Les AMO, alternatives à l’hébergement ?
  

 

Durée de la capsule : 10'10

Témoin : Bernard De Vos, DGDE

Interlocuteur : Corinne Dal Cero, directrice AMOSA

Lieu : AMO SOS Jeunes Quartier Libre, Bruxelles 

 

Lieu/Date de l'atelier  : Bruxelles, les 30/09 ; 25/11 ; 13/12

AMO Participantes : AMO Tempo, Samarcande, Cemo, AMOSA, le Déclic, Agora Jeunes, Point Jaune, Amos, Micados, AMO Rythme, Dynamo, Ancrages, AMO Rythmes, SOS Jeunes, Abaka

Personnes ressources du groupe porteur : Corinne Dal Cero (AMO AMOSA) et Thibault Duponchelle (AMO Agora Jeunes)


4/ Pauvreté et précarité, quelle approche en AMO ?
  

 

Durée de la capsule : 15'21

Témoin : Christine Mahy, secrétaire générale du RWLP

Interlocuteur : Valérie-Anne Adam, directrice AMO Mic-Ados

Lieu: Quartier de La Fourche à Marche-en-Famenne

      
 

Lieu/Date de  l'atelier  : Namur, les 19/09 ; 27/10 ; 28/11

Participants : Agora Jeunes, Amosa, Ancrages, Arpège, CEMO, Culture Jeunes Chamase, Droit des jeunes – Liège, Graine, Jeunes 2000, La Teignouse, Le cercle, Mic-Ados, Parler pour le dire, Passages, Point jaune, Service Droit des Jeunes, SOS Jeunes

Personnes ressources du groupe porteur : Audrey Joris (Fédération ANCE) et Valérie-Anne Adam (AMO Mic-Ados)



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 Un processus à poursuivre

   

Le travail réalisé au sein de GénérationS AMO, et tel que présenté dans ce document, est certes incomplet et inachevé dans sa formalisation actuelle ; il ne représente qu’un regard partiel et partial sur la réalité du travail mené par les AMO avec les jeunes et les familles tant de façon individuelle que collective.

Le projet « GénérationS AMO » s’est construit petit à petit, s’écartant et se rapprochant, au fil du temps, des objectifs imaginés au départ, s’inspirant naturellement et spontanément du « modèle de propension » abordé dans le contenu des échanges.

Aux questions qui se posent, nous ne souhaitons pas offrir de réponses arrêtées, mais nous espérons apporter divers éclairages sans avoir la prétention d’attribuer au service AMO une « définition » unanime, une plateforme exhaustive de fondamentaux qui fonderait une identité communément partagée. En effet, si on se rapporte aux expériences et aux propos partagés par les acteurs de terrain, il n’y a pas de réponse simple à la question de la spécificité de l’AMO, riche d’une série de fondamentaux et valeurs partagés, mais aussi traversé et travaillé par une série de tensions, de contradictions, voire de paradoxes qui en dessinent les contours.

Nous espérons que ce compte rendu des travaux menés jusqu’à présent permettra de nourrir les réflexions au sein des équipes, des fédérations de services et des pouvoirs publics, et qu’ainsi le processus inachevé se poursuivra.

Nous remercions particulièrement les équipes, les travailleurs sociaux et les témoins pour leur enthousiasme à participer à ce projet et le Fonds ISAJH pour son soutien financier.

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FriseProduction

 

         
   

Méthodologie du projet

Production/I. Montée en puissance du travail en réseau, quid du partenariat ? -Groupe de Mons


Capsule1

Constats partagés et fondamentaux historiques

Évolutions /Les changements observés dans l’environnement de vie des jeunes

Évolutions /Les changements observés dans les problématiques vécues par la jeunesse

Évolutions /Les changements observés dans l’environnement institutionnel des AMO et les conséquences en termes de travail en réseau

Le modèle de propension – questions, réflexions

>Production/ II. Le milieu de vie : les NTIC, le travail de rue... un milieu en mutation -Groupe de Liège

>Production/ III. Les AMO, alternatives à l’hébergement ? -Groupe de Bruxelles

>Production/ IV. Pauvreté et précarité, quelle approche en AMO ? -Groupe de Namur

>Conclusion

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 Constats partagés et fondamentaux historiques

   


Historiquement, on peut retrouver une série d’éléments concernant la notion du travail en réseau :

  • le terme réseau a été utilisé à l’époque quand un service travaillait avec des personnes ressources avec lesquelles la confiance existait sur différents points et où la reconnaissance mutuelle était présente ;
  • la construction du réseau nécessite du temps pour permettre, entre autres, une rencontre authentique ainsi que la prise en compte des différentes sensibilités ;
  • pour se déployer le réseau doit s’ancrer autour d’un projet et/ou d’un quartier ;
  • pour que le réseau fonctionne, il est important de faire quelque chose avec les gens et ne pas se limiter à des enjeux de présentation réciproque ;
  • le travail en réseau doit parfois s’articuler autour d’une double dimension : d’un coté un registre de coordination, parfois formel, entre les structures et de l’autre côté une façon de travailler ensemble entre les travailleurs sociaux concernés
    • les deux dimensions reprises ci-dessus doivent s’articuler et se développer dans une stratégie institutionnelle ;
  • l’injonction de faire réseau est problématique, car l’action demande de la subtilité et une capacité d’évolution ;
  • la capacité d’évolution du réseau n’est pas compatible avec la définition d’objectifs prédéfinis ;
  • le travail en réseau doit veiller à permettre aux bénéficiaires de co-construire les choses, car il est important de s’assurer que la parole des gens puisse influencer le cours de l’action.

Des éléments actuels sont mis en avant concernant le travail de réseau.

  • Le travail en réseau peut faire partie d’une stratégie de financement du service – subsides communaux, appels à projets, notion de « geste commercial ».
  • Le travail en réseau peut être influencé par son pouvoir organisateur, notamment lorsque celui-ci est en tout ou en partie « politique ». De même les partenaires historiques et l’histoire institutionnelle peuvent influencer le travail en réseau.
  • Le sens que l’on donne au travail en réseau devrait être questionné en équipe. Notamment :
    • comment travaille-t-on (ou non) avec des partenaires faisant choix/ou ayant des positionnements institutionnels différents, voire divergents ? ;
    • le travail en réseau pouvait parfois se réaliser sur l'identification d'un adversaire (exemple : la lutte contre les contrats de sécurité) – ce fonctionnement serait moins présent, car l’adversaire serait moins identifiable, plus diffus ;
    • le travail en réseau aurait tendance à s’orienter vers des enjeux de gestion des problématiques sociales – comment se positionne-t-on en tant qu’AMO ? ;
    • la multiplication des plate-formes et de nombreux petits services spécialisés pose des questions au niveau de l'efficacité ; travail plus complexe, car le nombre d’interlocuteurs augmente et la connaissance mutuelle diminue d’autant. Ne faudrait-il dès lors pas renforcer les structures existantes plutôt que de lancer des petites innovations, parfois méconnues et marginalisées dans le paysage global.
  • Les méthodologies de travail en réseau sont également questionnées :
    • est-ce qu'un service peut refuser de travailler avec certains partenaires ? Quelles seraient les conditions pour justifier une telle prise de position ? ;
    • la question du respect du secret professionnel dans le travail est posée. Cette exigence ne serait plus d'office une priorité pour d'autres acteurs et/ou secteurs ;
    • autour des situations individuelles, un service doit veiller à maintenir une articulation adéquate entre une approche non mandatée et une approche mandatée. Comment travailler en réseau avec des mandants sans aboutir à des mandats cachés et/ou implicites ? ;
  • les méthodologies de travail en réseau dans les missions individuelles et communautaires devraient peut-être être distinguées.
  • Le travail en réseau peut-être fortement coloré par l’environnement local ou général du service :
    • en milieu rural, le nombre d'acteurs à mobiliser peut être relativement réduit ; les nouvelles technologies de l'information colorent dorénavant la manière de travailler en réseau ; la lourdeur des situations individuelles et des contraintes bureaucratiques empêche d’investir dans un travail relationnel désintéressé ; les jeunes travailleurs ont moins de possibilités pour se constituer progressivement une culture du réseau.


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 Évolutions /Les changements observés dans l’environnement de vie des jeunes

   


Au-delà des différences inhérentes à la configuration locale des réalités, le groupe pointe les éléments plus structurels suivants.

  • Hausse de la précarisation / paupérisation, avec une évolution des familles : forte proportion de familles monoparentales, mais les difficultés vécues par ces familles sont plus lourdes qu’auparavant ; gentrification de certains quartiers.
  • En lien, l'émergence de l’État social actif : logique de droits et de devoirs, avec beaucoup plus de poids sur l’aspect « devoirs ».
  • Normalisation et normification nouvelles de la société. Il s’agit de s’inscrire dans des cases étroites, de ne pas quitter les rails. En cas de difficulté, on est très vite dans une psychologisation des problèmes, qui ne permet plus de prendre en compte la personne dans sa globalité.
  • Retour du sécuritaire, soit de manière flagrante (la police et les militaires en rue), soit de manière plus insidieuse (la tolérance zéro ; les contrats de rénovation urbaine et l'émergence des centres commerciaux ramènent aussi des dimensions sécuritaires). La psychologisation et la médicalisation font aussi partie de l’arsenal qui sert la tolérance zéro. Certaines difficultés sont très vite surmédiatisées, montées en épingle, et leur statut s’en trouve changé de manière parfois excessive (par ex. la problématique du harcèlement : est taxé de harcèlement la moindre friction qui pourrait se régler par la médiation).
  • Multiplication du nombre de services, (sur)spécialisation, saturation parfois de l’environnement par des acteurs de missions différentes mais pas toujours bien identifiés par les bénéficiaires, qui ne savent plus trop dans quel jeu ils jouent.
  • Apparition de la thématique des réseaux sociaux qui change la donne sur le contact qu’on peut avoir avec les jeunes et qui nécessite d’évoluer. Mais aussi, qui peut perdre les bénéficiaires dans un dédale d’informations qui les laisse désemparés ; la surinformation ne leur permet pas de savoir vers qui se tourner.


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 Évolutions /Les changements observés dans les problématiques vécues par la jeunesse

   

 

  • Hausse de la complexité des situations des bénéficiaires, touchant plusieurs secteurs ; (problèmes de santé mentale).
  • Apparition de la catégorie des « jeunes inclassables », ceux qui ont épuisé l'offre institutionnelle disponible sur leur territoire.
  • « Disparition » de la catégorie des 15-18 ans ; les AMO ont beaucoup de mal à les toucher et ne savent pas pourquoi.
  • Dans les grandes villes, la question de la radicalisation a provoqué des modifications dans la manière de travailler : le travail de rue est devenu plus difficile, certains projets ont dû être abandonnés.


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 Évolutions /Les changements observés dans l’environnement institutionnel des AMO et les conséquences en termes de travail en réseau

   


Des contours plus flous et moins balisés

  • Une contamination des logiques de travail en réseau par les approches et les théories systémiques est soulignée.
  • Les méthodes de travail des intervenants AMO ont progressivement changé. Des outils et / ou approches plus individualisés ont remplacé des outils et / ou approches plus collectives. Certaines AMO ne sont plus à l'aise avec les approches purement informelles, tant elles sont devenues rares.
  • Problème de secret professionnel, de plus en plus mis à mal par des partenaires qui n’en comprennent pas l’utilité, voire estiment que cela freine le travail.


Des avancées et des points de questionnement

  • Les AMO observent une évolution dans le travail avec le monde scolaire. Au niveau du travail communautaire, la relation est plus facile qu’autrefois, la légitimité de l’AMO est reconnue, les écoles (avec des variantes bien sûr) craignent moins pour leur réputation, il est plus facile de travailler avec les écoles même si elles font appel aux AMO en réactions à des événements plutôt qu’en prévention. Toutefois, en individuel, les AMO constatent qu’elles doivent composer avec les évolutions décrites précédemment : tendance à la psychologisation, relégation rapide.
  • La multiplication des acteurs peut conduire à diluer le sens des interventions et des interactions, une forme de concurrence s’installe parfois.


La dynamique de réseau en plate-forme pose question

  • Des dynamiques ascendantes qui s’étaient mises en place dans des réseaux spontanés sont contrariées, voire cassées par la mise en place des plate-formes intersectorielles, qui ont une dynamique plus descendante.
  • L’excès de formalisation freine les dispositifs, qui se télescopent. On passe beaucoup de temps à discuter, mais sans utilité concrète. Il y a de plus des mélanges dans les statuts des personnes, qui ne parlent pas au même niveau : les plate-formes regroupent des travailleurs de terrain et des décideurs, qui ne sont ni sur pied d’égalité, ni ne parlent du même point de vue. Les personnes représentent également plus que leurs services, mais parfois leur secteur, ce qui rend les débats complexes. Il y a confusion de rôle et d’identité.


La place des bénéficiaires

  • Même remarque à propos des réseaux de professionnels qui se réunissent autour de situations. Les prérogatives et missions des uns et des autres sont parfois des plus flous pour les familles. On peut parler d’environnement chaotique quand les gens ne comprennent pas de quelle place les intervenants parlent. Globalement, dans le travail en réseau, le bénéficiaire est de moins en moins au centre et de moins en moins acteur, c’est un débat de professionnels.


Des pentes difficiles à éviter

  • Les AMO pointent les dérives des logiques d’appel à projets. Elles se sentent parfois instrumentalisées par des partenaires (et les instrumentalisent en retour) : on met la charrue avant les bœufs, ce type d’appel à projet fonctionnant sur l’obligation de partenariat : c’est la logique de réseau qui est pensée d’abord, avant d’y greffer un projet, qui aura parfois été « tordu » pour entrer dans les cases. La visibilité passe avant l’efficacité, le projet devient parfois un alibi.
  • Dans la même veine, pour les appels à projets, c’est souvent l’innovation qui est le critère discriminant, ce qui a ses avantages car cela pousse à inventer et à être audacieux, mais qui a son revers de médaille : le pérennisation d’un nouvel essai n’est pas du tout envisagée dans l’appel, cela oblige à laisser tomber trop vite pour passer à autre chose.


Balises

  • Pour tenter de garder les bénéficiaires au centre lorsqu’on parle d’eux (parfois sans leur présence) dans des réseaux de professionnels autour de situations individuelles, trois éléments peuvent servir de balises :
  • savoir pourquoi on se réunit ;
  • ne partager qu’avec des partenaires soumis au secret professionnel ;
  • désigner un garant du secret professionnel et de l’intérêt du jeune (cela peut être l’AMO).
  • Pour mener à bien un travail en réseau, une forme d’altérité doit être maintenue ; pour des raisons d’efficacité, on intègre parfois dans les PO des AMO des partenaires ; cela peut être une erreur, des conflits d’intérêts peuvent apparaître. Il faut être dans le réseau, mais le réseau ne peut être en nous.


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 Le modèle de propension – questions, réflexions

   


(^Consulter : support théorique sur le modèle de propension-.pdf)
Concernant le modèle de propension , le constat est que, globalement, les AMO se retrouvent dans ce modèle. Il s'agit d'une logique pertinente pour le travail en milieu ouvert, que ce soit dans le travail individuel ou communautaire. Néanmoins, une série de précisions sont avancées, des réflexions et des questions se posent.

  • Le modèle de propension peut être vu comme un contre-pouvoir par rapport à la « tendance lourde » du modèle instrumental.
  • Les deux modèles peuvent être complémentaires : partir du modèle de propension pour construire l’action et après le rattacher à l’instrumental pour avoir une ligne de conduite qui permet d’avoir certains résultats visés. Le modèle de propension a parfois ses limites – le temps que ça demande peut essouffler le projet, les jeunes, les partenaires, les travailleurs.
  • La logique d'utiliser les deux modèles en complémentarité est pertinente à condition de garder la logique de propension comme une philosophie de base – et une logique instrumentale qui permet de ne pas être en décalage avec les partenaires, les obligations administratives. Néanmoins, il est parfois difficile de garder le cap quand on travaille avec certains partenaires.
  • Les projets issus des AMO se situent en général dans une logique de propension ; les projets descendants, ou dans lesquels on s'inscrit sans être initiateur, ont plutôt une logique instrumentale. Les contraintes qui tendent à mettre en avant cette logique sont : le manque de temps ; une logique organisationnelle technocratique ; une culture du résultat rapide et visible.
  • La logique instrumentale ne permet pas une participation réelle des jeunes / des familles dans une co-construction des actions. Il revient peut-être aux AMO d'être garant de l'implication de jeunes / des familles et du fait que l'action ou le projet répond bien à une demande émanant du public.
  • Les AMO doivent également veiller à ne pas être « instrumentalisées » dans les partenariats.
  • Des changements trop fréquents dans les professionnels (turn over) peuvent mettre à mal des partenariats – plus particulièrement dans une logique de propension qui demande de prendre le temps. Par ailleurs, il est important aussi que tout ne soit pas lié aux personnes mais qu'il y ait aussi un partenariat institué de service à service.
  • Certains estiment que même si la tendance générale est à l'instrumental, la « contamination » par les AMO (et aussi par d'autres acteurs comme l'éducation permanente) de la logique de propension peut avoir des effets dans certains partenariats, et auprès d'interlocuteurs, notamment ceux de longue date.


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 Constats partagés et fondamentaux historiques

   

 

Des milieux de vie

  • Le milieu de vie (ou plutôt les milieux de vie) sont l'essence du travail en AMO, puisque ce sont les endroits où l’on peut rencontrer les jeunes. Ces milieux de vie sont divers – rue, quartier, maison, école, Internet...
  • Selon les services, certains « milieux de vie » historiques (la rue, la quartier) ne sont plus investis pour différentes raisons : les jeunes ne sont plus là ; il y a d'autres éducateurs de rue, ou d'autres associations qui occupent le terrain (maison de quartier des PCS, ...) ; ...
  • ... ou au contraire, certains services réinvestissent les quartiers, les sorties d'école, la rue.
  • Le point commun est d'accéder à une proximité avec les jeunes afin d'établir un lien de confiance – par une présence régulière, des activités collectives, la discussion.
  • Distinction milieu rural et urbain - l'étendue du territoire, le réseau associatif présent, etc.
  • Les écoles peuvent être des lieux qui permettent de rentrer en contact avec les jeunes même si les AMO fonctionnent dans un cadre très différent du monde scolaire, ça permet de nouer un contact pour les rencontrer après, en-dehors de l'école.
  • Internet et les réseaux sociaux comme milieu de vie - cela amène de nouvelles questions notamment en termes de déontologie, de pratiques.


Le travail de rue

  • Le travail de rue est une méthodologie particulière, qui doit être mise en place de manière rigoureuse (présence régulière, déontologie et secret professionnel, non-jugement, capacités de créativité et d'adaptation à la situation, ...) - c'est un travail difficile, qui demande de la patience, de l'investissement et une position d'humilité.
  • Le travail de rue doit être délimité en termes de territoire et en adéquation avec les ressources de l'AMO – « si on veut être partout, on est nulle part ».
  • Un travail de rue peu balisé peut amener des effets paradoxaux : l'impression de « patrouiller » ; une relation vue comme normative par les jeunes ; ...
  • Cette méthodologie est utilisée (depuis quelques temps et toujours actuellement) par des agents qui n'ont pas les mêmes finalités que les AMO, ni le même cadre juridique (ministère de l'intérieur, commune via les différents plans PPP, PSI, PCS ou leur propre service jeunesse), ...
  • ...de ce fait, les identités parfois « se diluent », le travail effectué ne correspond pas toujours à la fonction sur papier...
  • ...et le public peut être « imprégné » d'une vision du travail social de prévention de type sanitaire ou sécuritaire.
  • Historiquement, la présence d'éducateurs de rue dont les missions pouvaient être divergentes par rapport à celles des AMO avait mené à un combat...
  • ...ce combat a été perdu – combat inégal, les moyens étaient disproportionnés.


Les pratiques

  • Historiquement, « on était plus dans la contestation, l'interpellation », « il y avait une prise de risque, on travaillait dans l'impulsion, l'intuition - allez hop, on fonce », maintenant, on n'est plus là-dedans.
  • Le fait de viser un public différent ouvre à de nouvelles pratiques et à la recherche de milieux de vie différents : à partir du constat que le service travaille principalement avec un public d'ados et de jeunes adultes, l'idée a été également de développer un travail avec les jeunes enfants, et donc d'aller dans des lieux où rencontrer des jeunes parents.
  • Certains services mettent en avant qu'une partie plus ou moins importantes de leur public est envoyé par d'autres services, ce peut être une situation ponctuelle, ou plus générale.
  • Selon les services, on peut identifier deux logiques relativement différentes en matière de travail individuel : on laisse venir, on n'est pas dans l'aide individuelle formelle, toute discussion peut être importante dans la construction du jeune, notamment par rapport à un référent adulte, ça peut déboucher sur un accompagnement plus formalisé ; vs. le travail se fait de plus en plus dans les suivis individuels formels, en accompagnement, dans les activités collectives, on formalise aussi des objectifs individuels.


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 Proposition sur les fondamentaux

   

 

Le sens du travail en AMO se trouve dans ses différentes missions et spécificités de fonctionnement qui doivent être prises comme étant complémentaires et en interrelations.

Les situations vécues par les jeunes et les familles et accompagnées par l'AMO (travail individuel) amènent des questionnements, des constats permettant de travailler à l'amélioration de leur environnement (travail communautaire).

Le travail en équipe, avec des travailleurs issus de formations souvent diverses mais ayant la même fonction amène une richesse de réflexions et de points de vue, tout en impliquant de questionner le sens du travail.

Une balise centrale permettant de guider l'action et la réflexion est que les personnes avec lesquelles on travaille doivent rester au centre de l'intervention, sujets de droits. Le jeune est vu comme un citoyen en devenir.

Principes généraux

  • Proximité – être proche du jeune, aller là où il se trouve.
  • Disponibilité - entamer une relation sur une base de confiance, sans jugement, sans préméditation ou idée préconçue sur ce qui peut advenir, se rendre disponible si nécessaire.
  • Travail à la demande (non mandat) - le travail doit être entamé à la demande du jeune/de la famille ce qui signifie qu’on accompagne, on est aux côtés, sans devancer la demande, ou répondre à des pressions extérieures.
  • Confidentialité - le jeune/la famille doivent être assurés que les informations qui sont échangées resteront à l’AMO.
  • Point de vue global - on travaille avec la famille, le jeune, dans sa globalité, on ne prend pas en compte un seul pôle, ou une seule facette de la vie du jeune ou de la famille, c'est aussi le jeune dans une société, dans sa relation avec son environnement.
  • Amélioration de l’environnement - on ne travaille pas qu'au changement des jeunes et des familles, on a aussi la mission de faire changer l'environnement, la liberté de pouvoir répondre à un besoin de la société et d'y être sensible.
  • Travail en équipe – on travaille avec des regards différents qui peuvent se compléter et qui peuvent amener une richesse dans le travail.

La question a été posée de savoir s’il y avait moyen d’aller plus loin que ces fondamentaux qui paraissent se limiter au cadre législatif.


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 Les évolutions en interne

   

  • De plus en plus de demandes sont orientées par d'autres services, par les parents (à nuancer selon les services).
  • La demande peut être perçue de manière diverse – dans la façon de la traiter, dans la définition limitante ou pas qu’on lui donne (demande portée exclusivement par le jeune sinon on ne travaille pas vs. on creuse jusqu'à trouver la demande minimale).
  • Il existe des enjeux de contrôle social forts qui peuvent peser sur le travail.
  • Les références théoriques et méthodologiques sont plus souvent qu'avant orientées « psy ».
  • Il y a moins d'interpellation dans une logique de combat et d'adversaire identifié comme tel.
  • Dans une logique de priorisation du travail, on va mettre l'accent sur le travail avec les familles et les jeunes plutôt que sur l'interpellation, parce qu'on travaille en urgence sociétale.
  • La logique d'appel à projets met en concurrence les services, « déstabilise » le travail communautaire.
  • Le travail en réseau et l'échange d'informations pourrait être poussé hors des balises légales du secret professionnel (notamment au sein du secteur).
  • Il y a une dépolitisation du discours dans les équipes.


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 Les évolutions externes

   

  • L'enjeu de l'emploi est différent pour les travailleurs (ce qui expliquerait l'implication différente dans des « combats »).
  • La logique individualiste, couplée à la « crise » (précarisation de l'emploi, logique de contrôle et de répression, etc.) pourrait conduire à retrouver cette logique dans le travail des AMO – localisation de l'action par service, par commune ; protection du service.
  • La logique « offre de service » orienterait le type d'action mise en place quitte à s'éloigner des missions premières.
  • De plus en plus de services sociaux sont submergés de demandes, et les AMO reçoivent des demandes qui ne correspondent pas toujours à l'AMO ce qui peut orienter la logique de travail (et de formation) pour pouvoir répondre à des problématiques individuelles.
  • Une tendance à la « psychopathologisation » du social peut également influencer la manière de travailler des AMO – travail en individuel plus important ; référentiels psychologiques.
  • La vision du travail social change, c’est le contrôle social et ce n’est plus l’émancipation.


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 Les NTIC

   

 

  • Les nouvelles technologies font parties intégrantes de la vie des jeunes, il est donc nécessaire de s’en préoccuper.
  • Chaque AMO avance à son rythme dans cette réflexion, et avec des utilisations diverses : diffusion d’informations pratiques ; porte d’entrée pour un premier contact (permanences) ; lieu de rencontre pour les jeunes entre eux ; entretien de conseil ou d’orientation.
  • Une série de questions doivent être posées en équipe avant de se lancer dans l’utilisation des NTIC.
    Des questions de type pratique :
    • quel usage veut-on faire d’un site, d’un profil facebook, etc. ? En lien avec cet usage, quel est l’outil le plus adéquat ? ;
    • a-t-on les ressources nécessaires en interne (compétences et connaissances techniques, théoriques, matériels, temps de travail pour l’entretien des outils,...) ? Si non, peut-on les trouver en externe ? ;
    • quels sont les risques éventuels à l’utilisation de certains outils ? Quelles sont les balises à définir pour éviter les dérives ? Etc.
    • Des questions de type réflexif :
    • comment être présent sur Internet et les réseaux sociaux sans accentuer certains types de dérives propres à ces technologies comme l’isolement, le détachement de la réalité, l’exhibitionnisme de sa vie privée, l’hyper-consommation, le harcèlement ? ;
    • comment respecte-t-on le cadre du secret professionnel ?


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 Les points d'attention (glissement/controverses/questions)

   

 

  • Comment en tant qu'AMO travaille-t-on la pression sociale avec le jeune ? Et comment travaille-t-on à diminuer cette pression sociale avec le jeune pour voir ce dont lui a besoin, envie, etc. Comment le fait-on dans nos pratiques, pour ne pas être dans une position normative ?
  • Le constat d'un déplacement des jeunes (« on ne les voit plus, on ne sait pas où ils sont »), ou d'un changement d'âge (« on voit des enfants de plus en plus jeunes ») nous interroge, entre autres : sur la transformation des normes par rapport à l'espace public ( gestion, occupation, privatisation) ; la notion de socialité et l'articulation individuel/collectif.
  • Est-on toujours aux bons endroits dans notre travail communautaire ? Qu’est-ce qu’on se donne comme moyen de travail pour atteindre les jeunes dans leur milieu de vie, sans attendre qu’ils arrivent par le biais d'autres services ? Comment va-t-on vers les jeunes qui n’arriveront jamais jusqu’à nous via les orientations ?
  • Les fondamentaux et l'identité commune sont également un enjeu de visibilité et de compréhension vis-à-vis des autres secteurs. Une identité trop fluide, trop adaptable ne risque-t-elle pas de se transformer en absence d'identité commune ?
  • Le constat est posé du recul d'un travail communautaire portant sur des enjeux stucturels de société - qu'est ce que ça pourrait impliquer à terme ? Faut-il s’en « ré-emparer » ? Comment ?
  • Le constat d'un « combat perdu » par rapport au travail de rue peut amener à différentes stratégies : renoncement ; cohabitation ; « contamination ». Comment les services tranchent-ils devant certains dilemmes ? Sur base de quels principes ?
  • Travaille-t-on à mettre des rustines, à participer, d'une manière involontaire, au système, en le renforçant faute de le remettre en question ? Ou contribue-t-on à transformer un peu la société, à ce qu'elle fonctionne mieux, à ce qu'elle soit plus juste ? Arrive-t-on à produire quelque chose par rapport à ça ? Souhaite-t-on encore être des acteurs de changements ? Se définit-on encore comme tel ? Si oui quels moyens se donne-t-on par rapport à la question du milieu de vie ?


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Constats partagés et fondamentaux historiques

   

 

  • Les AMO trouvent un ancrage dans différents mouvements historiques, notamment l’antipsychiatrie et la critique des institutions totales (cf. E. Goffman et J. Brunin).
  • Le travail relationnel avec les jeunes est un outil important. Il est important que des liens puissent se créer avec le public, notamment à partir du milieu de vie du jeune. La création de lien procure un sentiment de confiance et peut déboucher sur des engagements réciproques. Cette logique de travail relève d'une forme d’efficacité à maintenir.
  • Le travail en AMO ne peut pas relever d'un mandat, notamment judiciaire. À partir de là, le travail AMO peut néanmoins se déployer dans des expériences paradoxales comme l'hébergement 24h/24h. La distinction entre le placement (l'hébergement mandaté) et l'hébergement (outil de travail des AMO 24h/24h) doit être réalisée. Il convient de donner toute son importance à la question du non-mandat. Il est néanmoins souligné que l'AMO travaille à partir du mandat du jeune.
  • La possibilité d'apporter des réponses créatives aux demandes est un élément important.

Plusieurs participants soulignent le caractère complémentaire de leurs actions.

La part affectée à l'action ouverte reste marginale par rapport au reste. Le secteur des AMO est minoritaire dans le secteur AJ.

Le secteur AMO rencontre régulièrement des problèmes au niveau de la reconnaissance des autres institutions. Les AMO restent souvent des OVNI dans le paysage.

Il est précisé que si certaines AMO sont nées à la suite de combats de leurs promoteurs historiques, d'autres se sont coulées immédiatement dans le décret de 91 et dans les arrêtés d’applications. Pour ces dernières, il n'est pas évident de considérer que l'alternative à l'hébergement puisse être un des éléments fondateurs de l'action.


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Proposition de schéma pour se représenter les fondamentaux historiques

   


Par rapport à la thématique étudiée, les AMO pourraient se donner comme visées : trois enjeux importants. Cela donnerait un triangle déformable en fonction des spécificités de chaque institution.

Le jeune est maître à bord

La déjudiciarisation et le non-mandat Δ  Les placements sont évitables et doivent être évités

 

Il est précisé que les services qui insisteraient plus sur un élément, par exemple le fait que le jeune serait le seul maître à bord, ne nieraient pas d'office les autres enjeux du triangle.
Les AMO, qui ne se vivraient plus uniquement dans l'idée que les placements doivent être évités d'office et privilégieraient plutôt une notion de complémentarité, donneraient peut-être plus d'importance aux deux autres pôles du triangle.

Par rapport à la thématique d'éviter le placement, il est proposé de dire que les AMO veillent à ne pas déplacer le jeune et à privilégier le milieu de vie. Cela implique que si le jeune est en hébergement, il est possible que l'AMO travaille de manière complémentaire à l'institution mandatée.

Il est souligné qu'un travail d'accompagnement de l'AMO peut déboucher, dans l'intérêt du jeune, sur un placement juste et légitime. De la même manière, un travail avec une AMO à la sortie d'un hébergement ne pose aucun problème.

Il est précisé que le thème du « jeune maître à bord » doit être nuancé ; car les AMO travaillent également en tenant compte de la vie familiale, notamment avec les enfants en bas âge. Plusieurs personnes mettent en avant que les AMO se sont investies dans des logiques de soutien à la parentalité.

L'AMO peut se vivre comme lieu d'expérimentation pour le jeune. L'intérêt du jeune peut se traduire comme un accompagnement du jeune dans sa trajectoire pour « adoucir » les coups durs et permettre de rebondir après un ou plusieurs échecs.


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Les évolutions

   


Six points d’évolutions significativement mis en avant sont dégagés des échanges.

1. Dégradation générale du climat sociétal, économique, éclatement et isolement ; désaffiliation, désagrégation du milieu de vie, nouvelle problématique de désaffiliation - (quid missions communautaires ?) Evolution du public et des demandes adressées aux AMO.

La question posée est celle de l’adaptation des services à cette question du milieu qui se désintègre. Les AMO se situent comme des services qui ne peuvent nier la complexité de ces réalités ; ils constatent notamment en réponse à des demandes individuelles qu’ils développent une créativité qualifiée de ‘ créativité contrainte ’ ; celle-ci s’apparente plus à du bricolage en vue de donner une solution à des situations pour lesquelles ils ne sont pas outillés et qui ne sera pas nécessairement une solution vécue comme efficace.

Lien avec l’hébergement

Constat que les bénéficiaires (jeunes et familles) sont dès lors en demande d’hébergement classique, plutôt qu’en demande d’alternatives.
Quelles réponses donner ? L’AMO s’étant définie par cette offre d’alternative et sachant qu’il n’y a pas de places pour répondre à cette demande d’hébergement, les structures étant déjà surchargées, il semble qu’il n’y a plus de réponses dans le secteur pour ces demandes-là.
Comment trouver des solutions qui soient intéressantes, précises et nettes, à proposer aux jeunes ?

2. Evolution du tissu associatif, confusions des acteurs réels en jeu, quel rôle pour les AMO ? Pour faire face au point 1 (dégradation générale) il s’agit d’avoir un tissu associatif fort ; or l’environnement est devenu relativement confus : multiplication et confusion des opérateurs et des orientations (sécuritaires ou pas), et apparition d’autres évolutions (des associations qui peuvent faire façade à des objectifs non déclarés) – environnement partenarial confus : que fait-on stratégiquement ? On s’adapte ? On fait la différence ? On fait opposition ?

Il est proposé qu’une évolution face à la multiplication des services sur les mêmes territoires, pourrait être d’occuper l’espace public à travers des projets plutôt que du zonage, pour éviter une logique de lutte de territoire.

Pour les AMO c’est d’abord l’aspect de la confidentialité du lien, le secret professionnel, qui peut être utilisé comme outil de distinction dans le travail. Deux autres outils mobilisables identifiés sont le diagnostic social et l’interpellation.

L’indépendance des AMO et le rôle de revendication qu’elles peuvent mener semblent être peu à peu reconnus – cela est pointé comme une évolution – il s’agit de voir comment les AMO peuvent s’en saisir afin d’apporter des réponses en complémentarité avec les autres services dans les plate-formes communales par exemple, où elle peuvent parfois se permettre d’avoir une parole plus libre.

D’autre part, les AMO se disent qu’il serait possible de rendre plus largement publics les constats réalisés ne serait-ce qu’à travers le diagnostic social effectué.
Comment mettre également le diagnostic social au service de l’interpellation politique ?

3. L’évolution des familles, décomposées, recomposées, jeunisme… conduit à des évolutions de pratiques ; affronter de nouvelles exigences en la matière : le jeune trouve parfois difficilement sa place dans les fratries élargies, « jeunissement » des parents… Soutien à la parentalité.

Dans les évolutions, sont évoquées les familles recomposées et les séparations conflictuelles où l’enfant est parfois mis de côté ou pris à parti dans le conflit ; il y a beaucoup de familles où le jeune ne trouve pas sa place dans des configurations multiples.
Pour répondre à ces évolutions : les AMO créent des espaces de parents pour les aider à recréer du lien avec les enfants et avec eux-mêmes (réaffirmer l’estime du parent, son rôle).

Concernant l’alternative à l’hébergement
Les services peuvent faire le constat que des placements ponctuels suite à des conflits/séparations, se muent en cascade de placements par manque de places adéquates : or ce sont des placements qui, à leur sens, auraient dès le début pu être évités avec un travail sur la situation conflictuelle entre les parents à ce moment-là.

4. Les jeunes ont accès à plus d’informations qu’auparavant, mais ne savent pas nécessairement s’en saisir. Ils n’ont plus la confiance en eux minimum. Manque de pré-requis pour mettre à profit, pour pouvoir réellement être « seuls maîtres à bord », c'est-à-dire pour prendre des décisions les concernant. Ils ne sont pas assez outillés, manquent de recul…, cela pourrait impliquer une évolution de la manière dont on entend les demandes qui seraient à traiter.

Il est fait mention de différentes ruptures de mondes dans lesquels les jeunes évoluent et qui peuvent les mettre en conflit de loyauté : famille / scolarité / amitiés / adultes de référence / ...
Entre ces repères de valeurs différentes, qui peuvent amener le jeune à une rupture, l’AMO peut faire lien

  • d’une part en tant que médiateur entre les sphères où évolue l’enfant et les parents qui peuvent se sentir démunis par rapport à des comportements qui ne sont pas ceux du cadre familial ;
  • d’autre part en accompagnant les jeunes sans jugement, sans verticalité.

Pour éviter certains placements : prévention
Les jeunes sont en grande méfiance vis-à-vis des adultes, vis-à-vis des médias, vis-à-vis des associations, de la société en général…
L’AMO se pose alors comme faisant un travail qui permet d’éviter une crise et une rupture complète (à l’adolescence notamment, quand le jeune est en recherche de repères, parfois fluctuants) pour éviter certains placements : prévention.

5. Travail plus collectif (exemple d’une psychologue qui se dit que pour certains jeunes qu’elle suit, il serait peut-être plus intéressant pour avancer dans leur situation de travailler en groupe plutôt qu’individuellement, étant donné que nombre de troubles sont liés à des difficultés d’interaction/relation). Éclatement des liens sociaux, réinventer les collectifs pour lutter contre la solitude massive / manque de réseau.

Constat de changements à plusieurs niveaux : le cadre, la rue, les modes de communication, peut-être aussi les jeunes et les relations qu’ils entretiennent – notamment aussi à travers le virtuel.
Les AMO se questionnent sur cette nouvelle manière d’être en communication, en relation : n’est-ce pas superficiel et en même temps intime ? Ils estiment qu’il y a un apprentissage du relationnel à faire.

Point d’attention pour les AMO :

  • est-ce leur mission de créer du collectif ? Seuls ? ;
  • ou de collaborer avec des partenaires (maisons de jeunes, du quartier) pour que se crée un réseau dans ces lieux ? ;
  • ou d’orienter vers ces autres partenaires puis se désengager ?

6. Evolutions de l’alternative au placement, qui prennent en compte les évolutions du secteur de l’AJ : hyper spécialisation, mise en autonomie après un parcours institutionnel, l’éclatement scolaire qui peut conduire à l’errance.
+ Omniprésence du projet.

L’hyperspécialisation de l’aide à la jeunesse est complexe pour les bénéficiaires qui n’ont pas la compréhension du réseau, des services existants, autant que pour les acteurs eux-mêmes, ce qui ne permet pas toujours de comprendre les mesures prises à l’égard des situations vécues. Le placement a tout son intérêt quand, bien programmé en amont, il permet d’éviter une dérive du jeune dans d’autres placements à l’infini. Mais le mandant lui-même se retrouve en difficulté quand la situation ne correspond pas aux services éventuellement disponibles, ce qui implique une maltraitance pour le jeune qui est mis, de façon répétée, en échec puisque la solution ne répond pas à la situation.


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Questions, réflexions, propositions

   


Une connaissance de l’environnement institutionnel est nécessaire que ce soit à l’interne ou à l’externe du secteur :

  • entre AMO afin de répondre au mieux aux demandes du public qui évolue, il pourrait y avoir une logique de partage de ressources (méthodologies, actions à mener ensemble, etc.) ;
  • avec le secteur de l'hébergement afin de favoriser la complémentarité ;
  • avec le secteur de la santé mentale afin d'accompagner au mieux les problématiques croisées.

Les AMO ont une place à prendre dans la prise d'autonomie des jeunes dans une logique de travail sans contrainte et sans mandat car les demandes existent. Néanmoins certains écueils sont soulevés :

  • - les moyens en AMO sont limités et ce type de projet demande des moyens matériels et humains importants ;
  • - ce type de projet implique généralement une obligation de suivi pour le jeune – n’est ce pas en contradiction avec la philosophie de l’AMO qui travaille à la demande du jeune ? Comment travaille-t-on avec des jeunes à qui on « impose » l’AMO comme partenaire ? ;
  • - il est parfois difficile de ne pas être dans la confusion entre un projet spécifique de ce type et les autres missions de l’AMO.

Les AMO ont une mission d’interpellation. Ce rôle, cette mission devrait être réaffirmée par les AMO dans une vision collective du secteur. Il s’agirait notamment de pouvoir définir qui on interpelle ? Sur quelle(s) question(s) ou problématique(s) ? Comment on le fait ?

Les AMO ont un rôle politique en tant qu'acteurs de terrain, ils doivent faire remonter des observations et se mobiliser pour faire changer les choses. Il y a un travail à initier afin de rendre leur rôle politique aux AMO et aux citoyens.


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 Constats partagés et fondamentaux historiques

   


Les AMO ne sont pas toutes très pro-actives pour communiquer l'histoire institutionnelle et du secteur à leurs jeunes travailleurs (causes possibles identifiées : départ des fondateurs, documents écrits insatisfaisants au niveau de l'esprit existant au départ, pas une priorité mis en œuvre au sein des services, turn-over du personnel, crises institutionnelles antérieures qui empêchent un rapport serein au passée, etc.).

Certains éléments sont néanmoins mis en avant par rapport à la thématique travaillée en regard de l’historique du service ou du travail actuel.

  • Toutes les AMO sont confrontés à la précarité, néanmoins certaines AMO sont confrontées de manière très différenciée à la question, tant au niveau de la quantité (nombre de situations concernées par rapport à l’ensemble du travail ) que de l'intensité des situations (gravité des précarités vécues par les bénéficiaires).
  • La précarité augmenterait ces dernières années.
  • Au niveau du type d’intervention dans les situations de précarité : le travail individuel serait de plus en plus souvent préféré au travail communautaire ou collectif.
  • Prégnance du contrôle social - la responsabilisation des familles en situation de précarité est un fonctionnement global (modèle dominant), la possibilité de laisser faire les gens seuls est de moins en moins présente, l’aide est de plus en plus conditionnée (y compris dans le secteur culturel).
  • Une impression existerait que l'action et l'influence des AMO restent relativement limitées sur ces problématiques de précarité.
  • Une méconnaissance sur la manière de travailler avec ce public-là existerait aujourd’hui dans certaines AMO.
  • La mission de prévention des AMO aurait évolué : avant les AMO essayaient d'éviter que les gens tombent dans la précarité, aujourd’hui, les bénéficiaires seraient tombés dedans.
  • La culture de l'interpellation (et des risques du combat qui le sous-tend) aurait progressivement disparu au profit d'une professionnalisation - pérennisation - bureaucratisation de l'action.
  • De manière générale, l'action communautaire serait de plus en plus complexe et difficile :
    • « on marche sur des œufs quand on veut interpeller » ;
    • les effets de l'action d'interpellation ne sont pas toujours au rendez-vous ou ne sont parfois pas très visibles ;
    • il existe un sentiment de solitude des services qui interpellent au niveau local ;
    • le monde devient de plus en plus consensuel (politiquement correct), il faut l’accepter et en tirer les conséquences au niveau des interpellations ;
    • difficulté d'identifier les lieux stratégiques où l'action d’interpellation de l'AMO peut se déployer (par exemple : les autorités communales ont moins de marges de manœuvre qu'auparavant et donc ils sont moins réceptifs à l'interpellation (sauf en période électorale).


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 Proposition d'une interprétation

   


Par rapport aux différents éléments de fondamentaux historiques et aux diversités de points de vue et d’approches concernant la thématique, une proposition d’interprétation pourrait être une combinaison de 3 éléments :

  • donner la parole à ceux qui ne l’ont pas (plusieurs AMO expliquant historiquement leur création par rapport à cet enjeu, que tous, y compris les publics les plus fragiles, les plus pauvres aient accès à des moyens d’expressions culturels) ;
  • créer des espaces de liberté pour que des nouveaux possibles apparaissent ;
  • prioriser les groupes – mettre en place des dispositifs qui permettent de rencontrer les publics précarisés (c'est-à-dire ceux qui ont le moins facilement accès à la parole, à des espaces de liberté, aux services, etc.).
Donner la parole

Créer des espaces de liberté Δ  Prioriser les publics

 

L'articulation des trois éléments et le focus mis plutôt sur l'un ou sur l'autre sera particulier à chaque service.

Néanmoins, si on estime qu'un élément important de l’identité du secteur est la réduction des inégalités et qu'il s'agit de lutter contre ces inégalités, il faut certainement accepter qu’on apporte « plus à ceux qui ont moins », ce qui impliquerait de travailler à partir de la notion d’équité plutôt que celle d’égalité.

Par ailleurs, en termes de réponse à une demande, et pour tout jeune ou famille passant la porte du service, l'accueil, l'écoute et l'accompagnement restent des fondamentaux de l'AMO.


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 Les évolutions en interne

   

 

  • La précarité touche de plus en plus de familles et de jeunes, les difficultés d'accès aux droits fondamentaux, notamment, rendent le travail individuel compliqué (accompagnement administratifs pour remettre en ordre les droits, dysfonctionnements de certains services de première ligne, etc.). Cela implique qu'une partie de l'énergie et des moyens de l'AMO sont mis dans ce travail.
  • Le travail d'interpellation a diminué ou a changé de forme (collaboration et partenariat plutôt que combat) et de niveau (travail au niveau individuel et local).
  • L'AMO devient un des rares lieux d'écoute, d'accompagnement où la parole des personnes reste libre (cela pourrait être dû à une évolution du travail social en contrôle social).
  • Il y a une augmentation/apparition d'une population « classes moyennes » qui pousse plus facilement la porte des AMO qu’avant.
  • Certains services constatent une augmentation du public « familles » par rapport au public « jeune ».


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 Les évolutions externes

   

 

  • L’évolution de la gestion de l’espace public va dans le sens de la privatisation de cet espace, il y a donc une nécessité de veiller à conserver/créer des espaces de libertés en tant qu’AMO.
  • Le modèle dominant actuel a tendance à rendre seuls responsables les individus de tous leurs problèmes sans prendre en compte la société et ses dysfonctionnements structurels et/ou institutionnels.
  • Certains constatent une augmentation de « services » qui peut brouiller les rôles et les identités des services.
  • Au niveau du travail communautaire et d'interpellation, le constat est une dilution par multiplication (des lieux de discussion, des structures de relais, des organes de décision).


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 Les points d'attention (glissement/controverses/questions)

   

 


On constate que la thématique est relativement complexe sur différentes dimensions et que le débat pose des questions importantes pour le secteur.

  • Alors que tous s’accordent pour dire lors de la première rencontre que la précarité semble augmenter, il apparaît que ce n’est pas nécessairement le cas dans la population avec laquelle les services travaillent, certains se posant même la question de savoir où sont les personnes précarisées sur leur territoire.
  • Les services s’accordent à dire que la notion de précarité/pauvreté est multi-dimensionnelle, il n’existe néanmoins pas de définition commune – certains mettant en avant la potentielle fragilité de tout jeune quel que soit son milieu socio-économique ; d’autres insisteront sur les facteurs cumulatifs des différentes dimensions, et en premier la précarité socio-économique. Y aurait-il la nécessité de s'entendre sur une définition de la notion de précarité ? Si oui, laquelle ?
  • En lien avec l’absence de définition commune, le fait de prioriser les publics en fonction de la précarité ne fait pas l’unanimité - certains services tendraient vers un accueil « égalitaire », tandis que d’autres vont spécifiquement axer et réfléchir leur travail en fonction de cette notion de précarité/pauvreté (en termes de pratiques, méthodologies, choix des territoires, etc.), certains enfin combinant les deux visions - par choix (soucis de mixité dans les activités par exemple) ou par évolution (on fait le constat d’un public très précarisé qu’on va chercher, et d’un (nouveau) public qui est moins en difficulté socio-économique et qui pousse la porte de l’AMO). Les questions qui se posent de facto sont : en étant conscient qu’on n’a pas les moyens pour tout faire, comment fait-on nos choix ? Que se donne-t-on comme moyens pour atteindre/être disponible aux publics les plus précarisés, y compris ceux qui n’ont plus de demande, ceux qui ne pousseront pas la porte du service spontanément (tout en sachant qu’on pourrait remplir nos agendas et nos projets avec ceux qui ont les ressources de venir nous chercher) ?
  • Par rapport aux constats d'augmentation des inégalités et de mutation du travail social (de plus en plus contrôlant et normatif), quel serait le positionnement des AMO : dans le travail individuel ? Dans le travail communautaire ?
    • - dans le travail individuel ? - la question a été posée quant à savoir si les AMO sont encore les interlocuteurs adéquats pour travailler avec des familles, des jeunes en situation de très grande précarité sachant que le travail avec ces personnes demande énormément de temps et d’énergie (« il faut tout reprendre à zéro ») et que par ailleurs un autre public est en demande ;
    • - dans le travail communautaire - quelle est le rôle des AMO par rapport aux inégalités sociales au niveau sociétal (macro) ? Peut-on se reconnaître comme acteurs de prévention dans le seul travail individuel ?


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Méthodologie du projet

Production/ I. Montée en puissance du travail en réseau, quid du partenariat ? -Groupe de Mons

Production/ II. Le milieu de vie : les NTIC, le travail de rue... un milieu en mutation -Groupe de Liège

Production/ III. Les AMO, alternatives à l’hébergement ? -Groupe de Bruxelles

Production/ IV. Pauvreté et précarité, quelle approche en AMO ? -Groupe de Namur

 III. Conclusion et ouverture


A. Des fondamentaux politiques –un rappel important

B. Des fondamentaux en termes de visées pratiques -pour aller un pas plus loin

C. Sept déclinaisons pratiques, points d’attention, controverses et questions, pour aller plus loin dans la réflexion collective (1/2/3/4/5/6/7)

Pour ne pas conclure...


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 A. Des fondamentaux politiques
– un rappel important

   


Le projet « GénérationS AMO » avait pour objectif de revenir sur les fondamentaux des AMO « en jetant un regard sur le passé pour mieux comprendre les enjeux actuels et se projeter dans le futur » afin notamment de « renforcer une identité institutionnelle ». A ce titre, on peut considérer que le travail réflexif réalisé dans le cadre de ce projet a atteint son objectif de ré-affirmation de valeurs fondamentales constituant la spécificité associative du secteur AMO.

Effectivement, on peut estimer que les « grands fondamentaux » - émaillant les enquêtes, ressortant dans les témoignages d'acteurs historiques, et discutés dans les groupes de travail font l'unanimité. Ce sont des valeurs et des positionnements politiques que l’on retrouve notamment dans l'esprit des textes fondateurs des AMO : décret de l’AJ ; arrêté cadre des services agréés de l'AJ ; arrêté spécifique des AMO ; code de déontologie.

De plus, dans le processus, on retrouvait bien différentes générations :

  • d’AMOs – des plus anciennes créées fin des années 70 / début 80, aux plus récentes, début des années 2000 ;
  • ainsi que de travailleurs – de quelques mois à plus de 30 ans d’ancienneté.

Un intérêt supplémentaire étant de retrouver dans les groupes de travail aussi bien des directions que des travailleurs, le tout avec une diversité géographique importante dans chaque groupe (a d’ailleurs été souligné dans plusieurs groupes de travail tout l’intérêt pour les travailleurs de pouvoir rencontrer et débattre avec d’autres travailleurs d’AMO, ce qui n’est pas nécessairement courant, surtout avec les AMO de régions plus éloignées).

La réflexion à partir de laquelle des fondamentaux sont ré-affirmés est donc le fruit d’un travail effectué par un ensemble d’acteurs assez hétérogènes, si ce n’est réellement représentatifs.

Néanmoins, dans ces fondamentaux, on peut constater une diversité de « traductions » par chaque institution. Afin de rendre compte à la fois de la base commune mais également de la possibilité de différenciation, les 4 « sources de la critique au capitalisme » ont été retenues comme point de vue structurant ces fondamentaux.

Nous devons aux sociologues Boltanski et Chiapello (L. Boltanski et E. Chiapello.- Le nouvel esprit du capitalisme - Paris, Ed. Gallimard, 1999) la description des « indignations » qui sont à la source de la critique du capitalisme et qui ont donné lieu aux principaux mouvements sociaux. Pour les auteurs, le capitalisme, laissé à lui-même, génère quatre types de maux :

  • de la misère (par un système inégalitaire) ;
  • un individualisme excessif (manque de solidarité, égoïsme) ;
  • de l'oppression (domination, manque de liberté) ;
  • un système de vie inauthentique (consumérisme, société de masse, etc.).

En réaction, quatre types de critiques se sont développées :

  • deux de nature sociale (la critique de la misère et des inégalités, celle de l'égoïsme et de l'individualisme), qui s'est structurée autour des anciens mouvements ouvriers et des syndicats, et qui réclame plus d'égalité et plus de solidarité ;
  • et deux de nature culturelle (ou « artiste » disent les auteurs), issues de mouvements sociaux plus récents et qui revendiquent des droits liées aux choix de vie (l'authenticité et la liberté) ; parmi ces revendications, on trouve la maîtrise de la sexualité et de la procréation, la fin de vie, etc., soit des droits plus individuels.

Les AMO pouvant être considérées dans leur individualité de service (chacune ayant des particularités qui la rendront selon ses spécificités plus sensible à un pôle ou à un autre) ; et néanmoins comme un secteur à part entière qui fait institution dans son identité commune :

« Nous entendons par là que l'institution doit être considérée comme le résultat d'une dynamique institutionnelle qui correspond, d'une part, à un rejet de l'insuffisance d'un présent (ou d'un état de la situation) et, d'autre part, à la définition d'une volonté critique, qu'elle soit lutte pour l'égalité, la solidarité (sur le versant social) ou pour la liberté et l'authenticité (sur le versant culturel). » (A. Jamar, J. Fastrés, « Le sens et l'importance d'un travail de l'institution sur elle-même », in Intermag, Carnet Livre de vies : Plus d'un siècle d'accueil de l'enfance à Bruxelleshttp://www.intermag.be/analyse.)

Chaque AMO, par son histoire institutionnelle, plonge ses racines dans les fondamentaux que sont la lutte pour l'égalité, la solidarité, la liberté et l'authenticité, avec des attentions particulières pour l'un ou l'autre pôle. De même dans les évolutions des services, il peut y avoir des ajustements ou des changements de priorités selon la réalité de terrain.

Ci-dessous chacune des 4 valeurs fondamentales est définie en orientations plus précises amenées dans les différents moments du projet GénérationS AMO.

Ces orientations sont illustrées par des propos tirés du travail d’enquête proposé à chaque AMO. Les questions dont sont issus les extraits ci-dessous portaient notamment sur :

  • La motivation : Pour quelle raison ce service a-t-il vu le jour ? Quels étaient les constats de départ qui ont motivé cette création ?
  • Que voulaient les créateurs ? Créer quelque chose qui manquait ? Combattre quelque chose ? Quel était ce manque ? Ou quelle était la chose à combattre ? Pour qui, pour quoi fallait-il se mobiliser ?
  • Avec le recul, si vous deviez donner une devise à ces débuts, quelle serait cette devise ?
  • S'il fallait mettre en avant une action des débuts, dont l'AMO peut être particulièrement fière, quelle serait cette action (un projet, une mobilisation, un travail de l’ombre…) ?
  

 Fondamentaux AMO
(*Les citations proviennent de l’enquête menée préalablement aux groupes de travail)


  C R I T I Q U E
  S O C I A L E

      


E g a l i t é

      
  • défense des droits pour tous, et particulièrement pour ceux qui n’y ont pas accès (jeunes, familles précarisées…)

« L’AMO t’informe et te défend » - Il reconnaît que les jeunes ont des droits et sont des sujets de droit »

  • réduction des inégalités, justice sociale

« Lutter contre l’exclusion sociale dont sont victimes les jeunes et favoriser l’accès à l’autonomie des jeunes et des familles. »

« Droit et autonomie ». « Pour y voir plus clair, pas besoin d’aller trop loin ». « Certains jeunes avaient besoin d’être défendus dans leur droit à un logement et à des moyens de subsistance corrects (nourriture, vêtements…). L’AMO souhaitait les informer et les défendre dans ces droits fondamentaux, afin de leur permettre une vie digne et autonome et éviter l’exclusion sociale et les comportements à risque. »

 


S o l i d a r i t é

     
  • amélioration de l’environnement - articulation du travail individuel avec l’axe collectif et communautaire

« « On ne cohabite pas en isolant » (La tonalité politique de l’époque était bien de considérer et d’appliquer des dispositions qui visaient les populations migrantes comme, au mieux, des citoyens de seconde zone, à tenir à l’écart.)
Il y avait des manques, des besoins criants en matière d’aide en faveur de la jeunesse et ce d’autant plus qu’il n’y avait pas de structure porteuse de projet pour les jeunes. »

« Volonté de créer un service indépendant et apolitique sur le territoire, en vue d’apporter une aide individuelle, collective et communautaire aux jeunes et à leur famille. »

  • importance du collectif et de la participation

« Tous ensemble ! - Pourquoi ? A la création de l’asbl, ainsi que lors des premières années de vie de l’AMO, c’est le volet communautaire qui était mis en avant ; avec la volonté de créer des actions collectives réunissant les jeunes, mais surtout leurs familles vivant des phénomènes de pauvreté, et d’isolement (géographique, culturel...). »


 
  C R I T I Q U E
  C U L T U R E L L E

      


 L i b e r t é

      
  • non-mandat

« La réflexion sur l’accompagnement socio-éducatif hors de l’institution a mené assez naturellement à élargir la réflexion à l’aide sans mandat et à l’action communautaire préventive. »

  • confidentialité, secret professionnel

« Le jeune/la famille doivent être assurés que les informations qui sont échangées resteront à l’AMO »

  • travail à la demande des jeunes et des familles/des collectifs

« Toute demande a toujours été et sera toujours entendue :
- parce que l’on n’a pas de meilleur outil que de partir de la demande ;
- parce qu’il n’y a pas de conditions pour être entendu. Toute personne a droit à un contact. Par la suite, nous pouvons accompagner, orienter... »

  • donner/rendre la parole à ceux qui ne l’ont pas/plus

« Développer le travail communautaire, donner la parole aux jeunes, aux familles, les associer, valoriser et non faire de l'assistanat. D'abord faire un travail de reconnaissance au niveau culturel, premier besoin de la population. »

 


A u t h e n t i c i t é

     
  • jeunes et familles comme pilotes de l’action

« Se poser pour réfléchir et mieux repartir – Pourquoi ? Parce que l’AMO donnait au jeune en difficulté le temps de réfléchir à sa situation avec un travailleur social afin d’envisager plusieurs pistes de solution qui lui conviendrait. »

  • accompagnement dans la création de soi-même/émancipation

« Les jeunes et les familles sont et doivent être considérés comme pro acteurs et au centre de l’accompagnement. Ce sont eux qui sont à l’origine de leur itinéraire, qui évoluent selon leurs rythmes, imaginent, créent et évaluent leurs projets. »

  • créer des espaces de libertés et d’expression pour que des nouveaux possibles apparaissent

« Les réflexions et constats préalables portaient sur les difficultés vécues entre la jeunesse et l’autorité et sur le manque d’espace de parole et d’info accessibles pour les jeunes… volonté de créer une nouvelle dynamique associative qui pourrait répondre au mieux aux demandes des jeunes et des familles et proposer une aide, une information, un accompagnement ou l’implication dans des projets et actions collectives visant le mieux-être, l’accès aux droits et l’émancipation des personnes. Organiser des événements qui avaient du sens et dans lesquels les jeunes puissent se sentir être acteurs. »


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 B. Des fondamentaux en termes de visées pratiques
- pour aller un pas plus loin

   


Malgré l'importance de ré-affirmer les valeurs qui fondent l'action des AMO comme nous l'avons vu ci-dessus, la volonté du projet « GénérationS AMO » était , si possible, d’aller un peu plus loin dans la démarche de recherche d’une identité commune au secteur.

Le pas suivant a donc consisté à tenter de dégager quelles seraient les pratiques centrales découlant de ces fondamentaux.

On a pu constater que cette volonté, cette envie de pouvoir aller plus loin dans la définition d’une identité forte s’est également retrouvée dans les groupes de travail, certains explicitant clairement qu'il serait frustrant de ne pas pouvoir aller plus loin que la référence aux textes légaux existants et que l’explication de celle-ci par les quatre sources de la critique.

Néanmoins, une difficulté s'est présentée dans la tension entre « vouloir construire une identité commune forte » tout en conservant « l’irréductible spécificité de chacun » : tension en homologie avec les fondamentaux dégagés qui nécessitent de pouvoir articuler égalité et liberté / solidarité et authenticité – cette articulation nécessite effectivement un travail d’équilibriste pour ne pas verser dans les travers que sont l’égalitarisme d’une part, l’individualisme d’autre part.

Cela nous rappelle aussi la difficile nécessité de jongler entre le travail individuel, collectif et communautaire : quelles priorités ? Avec quelles visées ? Et quelles articulations entre les différents niveaux ?

Nous avons néanmoins pu dégager 10 éléments pratiques centraux
  1. Prioriser – mettre en place des dispositifs qui permettent de rencontrer les publics qui ont le moins facilement accès à la parole, à des espaces de liberté, aux services, etc.
  2. Travailler à partir de la notion d’équité – le terme renvoie à l'idée de justice sociale – plutôt que d'être dans un cadre légal strict qui renvoie à la notion d'égalité c'est-à-dire la même chose pour tous ; on estime plus juste de prendre en compte les inégalités existantes en mettant « plus pour ceux qui ont moins ».
  3. Proximité – être proche du jeune, aller là où il se trouve (dans la rue, les quartiers, dans les familles, les écoles, les endroits de loisirs, sur les réseaux sociaux…).
  4. Disponibilité et accessibilité – entamer une relation sur une base de confiance, sans jugement, sans préméditation ou idée préconçue sur ce qui peut advenir, se rendre disponible si nécessaire.
  5. Point de vue authentique et émancipateur – l'individuel, le communautaire et l'articulation des deux – au niveau individuel – travailler avec la famille, le jeune, dans sa globalité, ne pas prendre en compte un seul pôle, ou une seule facette de la vie du jeune ou de la famille mais également dans la société, dans sa relation avec son environnement ; au niveau communautaire – dépasser le local, le sectoriel ; et dans l’articulation des différents niveaux – comment penser l’action communautaire en regard des situations individuelles ? Comment connecter les jeunes et les familles avec les actions communautaires ?
  6. Travailler en équipe – travailler avec des regards différents qui peuvent se compléter et qui peuvent amener une richesse dans le travail. Cela nécessite également de se mettre en capacité de prendre un recul réflexif par rapport aux choix institutionnels, aux stratégies mises en place et aux outils utilisés, tout en étant vigilant à conserver une identité commune de service et de secteur.
  7. Créativité et liberté méthodologique des services – le travail individuel et communautaire doit se faire en regard de ce qui émerge de l’environnement, des jeunes et des familles, des expressions (ou par le constat de leur absence) de révoltes, désirs, injustices, demandes, dysfonctionnements, etc., ce qui implique que chaque service soit capable de créativité et puisse imaginer et éprouver les outils qu’il estimera les plus appropriés dans la situation.
  8. Modèle de propension comme logique d’efficacité – modèle qui consiste à concevoir l’action en s’inscrivant dans le processus préexistant pour le faire évoluer en exploitant le potentiel déjà présent dans la situation – aussi bien dans l’individuel que dans le communautaire.
  9. Engagement politique de l’institution comme acteur de transformation – les AMO doivent avoir un positionnement politique clair, c’est-à-dire revendiquer leur place d’acteur de changement pour une société plus juste, luttant contre les inégalités et pour l’accès aux droits fondamentaux pour tous.
  10. Indépendance et autonomie – la position des AMO comme acteurs de transformations et révélateurs de dysfonctionnements ne peut être assurée que si celles-ci bénéficient d’une indépendance (non ingérence et non instrumentalisation par un pouvoir quel qu’il soit), et d’une autonomie, notamment en matière de méthodologie, mais également à un niveau financier.

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 C. Les déclinaisons pratiques
points d’attention, controverses et questions,
pour aller plus loin dans la réflexion collective

1) « Priorisation » des groupes / Travail à partir de la notion d’équité

2) Proximité Disponibilité et accessibilité

3) Point de vue authentique et émancipateur l'individuel, le communautaire et l'articulation des deux

4) Travail en équipe, créativité et liberté méthodologique des services

5) Logique de propension

6) Engagement politique de l’institution comme acteur de changement

7) Autonomie et indépendance des services


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Pour rendre compte de l'ensemble du travail dégagé par le partage d’expériences, il était indispensable d'amener une série de débats parfois animés, de désaccords mineurs ou parfois plus importants, de réflexions, questions, analyses, hypothèses qui ont été mises au travail dans les différents groupes.

Ces réflexions riches, incomplètes et qui nécessiteraient certainement d'être poursuivies dans les services et dans le secteur AMO, entre les différents services, sont mises en perspectives avec les différents « fondamentaux pratiques » en dégageant :

  • des constats répertoriés ;
  • des questions qui se posent ;
  • des propositions d'analyses le cas échéant.

 

           

 1) « Priorisation » des groupes
Travail à partir de la notion d’équité

   


Un des témoins sollicités avance ce raisonnement en termes de priorisation :

« Même si elles n’ont pas été créées à mes yeux par rapport à la précarité, je trouverais anormal qu’une AMO ne se dise pas : « Avec les moyens que j’ai, matériels, financiers, de bâtiments, de localisation, qu’est ce que je choisis de faire en priorité ? ». Et je trouverais anormal de ne pas prendre en compte l’idée de se dire : « Je vais quand même essayer d’être à disposition des jeunes qui sont le plus dans la parole confisquée ». Et on sait que dans la précarité, on peut être encore plus dans la parole confisquée, dans le fait de ne pas être reconnu, de ne pas avoir de place, etc. »

Suivre cette logique impliquerait que chaque AMO fasse un travail de priorisation sur son territoire (via le diagnostic social notamment) afin de repérer les groupes, les endroits, les populations qui seraient le plus lésés en termes d’accès aux droits et de justice sociale, y compris ceux qui n’expriment plus de demandes pour toute une série de raisons (craintes que ça ne fasse pire, épuisement général, mauvaises expériences, défiance envers les institutions en général, ras le bol d’être constamment en position inférieure, de demande, de justifications…).

Toutefois, le raisonnement de Robert Castel invite à adopter une vision de la précarité qui dépasse la seule composante économique et financière. Castel met en effet en avant le rôle joué par les solidarités socio-familiales pour prévenir ce qu'il appelle la désaffiliation (^Consulter : support théorique sur la notion de désaffiliation-.pdf). Certains rappellent d'ailleurs que les difficultés éducatives peuvent se rencontrer dans toutes les classes sociales.

On peut donc dire qu'être attentifs à la présence de tels supports de solidarité ou que prévenir leur rupture est important en termes de prévention.

En tout état de cause, deux questions semblent prioritaires à travailler :

  • Quelles représentations se fait-on de la (très grande) précarité (celle-ci tend en effet à être rendue peu visible dans nos sociétés très riches, où les inégalités recommencent à augmenter) ?
  • Quels moyens se donne-t-on pour la connaître et pour se rendre disponibles à ces publics ?

 

           

 2) Proximité
Disponibilité et accessibilité

   


Les acteurs de terrain sont d'accord sur la nécessité de se mettre « à disposition » du public et de facto, d'être présent dans son milieu de vie. Néanmoins la notion de milieu de vie est relativement large : la « rue » ; l'école ; la famille ; les réseaux sociaux... sont autant de lieux qui sont investis de manières diverses selon les particularités des services : zones géographiques couvertes ; histoire ; taille de l’équipe ; etc.

Dès lors, des questions se posent à différents niveaux selon le milieu de vie que l’on investit, ou que l’on souhaite investir.

Pour ce qui est de la rue – à la fois lieu de travail historique et méthodologie structurante de la vision milieu ouvert pour certaines AMO – les évolutions sociétales ont sensiblement changé l’approche que les équipes en ont. Des constats partagés dans les différents groupes font état : de jeunes beaucoup moins présents en rue dans certaines zones géographiques ; de nouveaux travailleurs de rue présents sur des territoires historiques des AMO ; d’une vision de la rue en tant qu'espace public fortement modifiée.

Ces constats invitent à se poser les questions suivantes :

  • le travail de rue doit-il être considéré comme un fondamental indispensable ? Sous quelle(s) forme(s) pourrait-on le ré-inventer : zonage ; activités informelles ; « permanence » extérieure dans des endroits stratégiques... ? ;
  • comment s'adapte-t-on face aux différentes évolutions sociétales – privatisation de l'espace public, logique sécuritaire, arrivée de « nouveaux travailleurs de rue » (Plan de cohésion sociale, contrat de sécurité...) ?

L'école est un endroit incontournable de la vie des jeunes et des enfants ne fût-ce que par le temps qu’ils y passent. Toutefois, malgré l'importance de l'école en tant que milieu de vie du jeune, il est nécessaire pour les AMO de garder une juste distance afin de rester dans le cadre de leur mission ce qui invite à se positionner au moins sur 2 questions.

  • Comment être présent par rapport à l’école ? Dedans (dans de l’animation avec les enfants, les jeunes, dans des réunions de concertation avec les professionnels...) ou en dehors (aux sorties de cours, dans des concertations plus larges hors monde scolaire...) ; de manière pro-active (présentation du service, proposition de projet...) ou à la demande (travail sur des situations individuelles, « commande » de projet...) ?
  • Comment se préoccupe-t-on des jeunes qui ne sont pas à l'école ?

Concernant les réseaux sociaux, le constat partagé est que le net et l'ensemble des réseaux sociaux sont devenus un lieu incontournable pour les jeunes, ce qui impliquerait pour les AMO, a minima, de réfléchir à sa présence ou non sur ces nouveaux lieux ; du sens qu’on y met ; des objectifs et des moyens à développer ; des risques ou dérives éventuels.

Une série de questions fondamentales se posent face à ce nouveau défi :

  • qu'en est-il de la déontologie, de l'éthique de travail et du secret professionnel ? ;
  • jusqu'où estime-t-on adéquat d’utiliser les réseaux sociaux : donner de l’information ; entrer en relation ; réaliser un suivi... ? ;
  • dans une logique sociétale de plus en plus prégnante de l’hyper connexion avec un de ses corollaires qui est un effacement des limites entre privé et public, l’AMO doit-elle s’adapter, résister ?

Les notions de disponibilité et d’accessibilité nécessitent de se positionner quant à la mise en œuvre de pratiques très concrètes qui seront adaptées au public avec lequel on travaille.

Certaines de ces pratiques ont été évoquées et nous avons pu constater la diversité de mise en œuvre selon la réalité de l’AMO et du public rencontré :

  • les permanences, souvent (re)réfléchies – décentralisation, horaires changeants, porte toujours ouverte, permanence téléphonique ou sur Internet, etc. ;
  • la mobilité – nécessité d’organiser les déplacements pour les activités, rencontre en famille, réflexion générale sur les difficultés de mobilité subies par les personnes, etc. ;
  • l’aspect financier – gratuité totale des activités, possibilité d’arrangement selon la situation, offre de collation et/ou de repas, etc. ;
  • le « travail de base » à réaliser avant d’être disponible pour le travail éducatif – aide à la mise en ordre administrative, récupération de droits, etc.

Globalement, ces pratiques sont sous-tendues par une volonté des AMO de s’adapter à la réalité des jeunes et des familles afin de pouvoir réaliser effectivement leurs missions. Comme le rappelle un participant : « Les armes et les outils que l’on possède c'est notre flexibilité, notre souplesse et notre capacité d’adaptation ».

Le travail réflexif et adaptatif par rapport à ces pratiques est néanmoins plus qu'utile pour éviter de tomber dans le piège des points de vue normatifs, ou dans des routines qui ne seraient plus en adéquation avec les réalités des jeunes et des familles.

 

           

 3) Point de vue authentique et émancipateur
l'individuel, le communautaire et l'articulation des deux

   


Dans le travail individuel, les travailleurs s'accordent sur le fait que prendre le jeune/la famille tel qu'il/elle est, dans sa réalité complète et complexe (sociale, scolaire, financière, familiale, culturelle...) est incontournable. De plus, le travail s'effectue selon ce que le jeune/la famille amène et ce sur quoi il/elle souhaite travailler. Il s'agit bien de rester au plus près de ce que sont les personnes, sans vouloir les changer, les faire entrer dans une case – on est dans une recherche d'authenticité dont les personnes doivent rester les pilotes.

Le type de travail dans la mission individuelle est varié : accompagnement, orientation, défense d'un droit, information, soutien éducatif, travail relationnel… Il sera adapté selon chaque situation et visera à permettre au jeune/à la famille de mettre en œuvre ses propres capacités d'analyse et de recherche de solutions ; de (re)prendre le contrôle de sa vie sur le point qui pose question, de surmonter la difficulté présente ; et de s'affranchir (à plus ou moins court terme selon les situations) de l'accompagnement de l'AMO – on est dans une visée d'émancipation.

On constate néanmoins que le débat est (reste ?) ouvert en ce qui concerne différentes dimensions du travail individuel. Les questions suivantes méritent certainement d'être partagées.

La notion de demande

  • Faut-il trouver la demande à tout prix au risque de ne pas « entendre » le fait que le jeune ou la famille n'en a pas ? Ne peut-on travailler qu'avec une personne ayant déjà réfléchi, analysé et formalisé sa « demande » ? Entre ces deux extrêmes, quelle voie permet de respecter la liberté des personnes, y compris celle de ne pas vouloir être aidé, accompagné, tout en restant attentif à entendre ce qui ne se dit pas/plus, ou difficilement ?
  • Comment travaille-t-on les demandes qui viennent de l'extérieur – services AJ, autres services, parents pour un jeune, etc ? Comment fait-on face aux difficultés inhérentes à ce type de demande – pressions, demandes d'informations sur le travail de l'AMO, impression d'adhésion « factice » à l'accompagnement, logique de double contrainte, etc. ?

Les outils du travail individuel

  • L’utilisation de plus en plus importante de théories et d’outils issus de la psychologie amène à interroger la notion de travail éducatif dans l’accompagnement individuel. Qu’est-ce qu’un travail éducatif ou socio-éducatif ? Quelle est la différence ou la limite avec un travail de type psychothérapeutique (interdit par l’arrêté AMO) ?

On pourrait penser à l'instar de Robert Castel que le questionnement mériterait d'être approfondi en le mettant en lumière avec une société qui évolue à la fois dans un modèle gestionnaire et moralisant :

« Mais c’est en même temps un peu paradoxal. On pourrait penser, sans être nécessairement un inconditionnel de la psychologie, que celle-ci est du côté du savoir, de l’affranchissement à l’égard des traditions, de la modernité. Mais aujourd’hui, la psychologisation accrue coexiste parfaitement avec le renforcement du moralisme, au point qu’ils paraissent s’étayer l’un l’autre. C’est un point qui mériterait d’être approfondi ».(Cf. Sociologies pratiques, 2008/2 (n°17), Éd. Presses de Sciences Po, « D’où vient la psychologisation des rapports sociaux ? », Entretien avec Robert Castel et Eugène Enriquez, réalisé par Hélène Stevens. URL www.cairn.info/revue-sociologies-pratiques-2008-2-page-15.htm)

Au niveau communautaire,

les discussions ont permis de visualiser la multiplicité et la diversité des projets existants. Les travailleurs font par contre le constat que, de plus en plus, les projets sont des projets à l'échelle locale ; et de moins en moins souvent des actions d'interpellation plus larges.

Le sentiment général est qu'il est difficile et énergivore de faire remonter des observations de terrain (dysfonctionnements, manques, etc.) et de réussir à faire bouger les choses, hormis peut-être sur des actions très ponctuelles.

Par ailleurs, certains tendent à faire un lien entre un travail individuel de plus en plus « lourd » et complexe et une difficulté à s'investir dans des actions communautaires – plus les conditions de vie (accès aux droits fondamentaux) se dégradent ; plus les situations sont difficiles à gérer ; moins on a d'énergie à mettre dans les actions communautaires...

Et pourtant, majoritairement, les AMO s’accordent à mettre en avant l'importance de conserver les différentes missions de l'AMO car ce sont bien ces différentes missions et leur articulation :

  • qui font sens dans une vision émancipatrice – le droit pour chacun d’accéder aux moyens de construire sa propre vie ;
  • qui font sens par rapport à la spécificité du secteur – travailler à l'amélioration de l’environnement des jeunes et des familles sur base de constats et d'analyses de terrain.

Il s'agirait donc de se poser les questions suivantes :

  • en tant que travailleurs au plus proche de la réalité des familles, nous sommes certainement l'un des acteurs les mieux placés pour faire remonter une série de constats et d'informations – comment peut-on faire pour que ces informations soient cohérentes et audibles aux endroits ad hoc ? ;
  • comment peut-on se renforcer dans une vision « méta » de l'action communautaire qui permettrait de ne pas s'épuiser chacun de son côté ? Quels sont les relais éventuels et les alliances possibles ?

 

           

 4) Travail en équipe, créativité
et liberté méthodologique des services

   


Le travail en équipe, qui comprend une dimension collective – on réfléchit ensemble aux différentes dimension de notre travail –, et hétérogène – chacun amène son point de vue riche de son expérience et son expertise –, apparaît comme une donnée fondamentale de l’AMO.

Ce travail d’équipe semble être :

  • un garant du cadre de travail à respecter notamment grâce à un recul réflexif par rapport aux choix institutionnels, aux stratégies mises en place, aux outils utilisés, etc. ;
  • un moteur en termes de créativité, de richesses des projets, de construction de solutions alternatives, etc.

De fait, les services insistent tous sur l’importance de la liberté méthodologique, et de la créativité dans le travail. Le choix des méthodologies utilisées, des référents théoriques convoqués, des outils maisons construits à partir de constats du service, etc., est un incontournable et quelque part cette diversité fonde en elle-même une partie de l’identité du secteur AMO.

Néanmoins, le constat est également fait que cette diversité tellement importante peut amener deux niveaux de difficultés.

  • A l’interne des services et du secteur, il est parfois compliqué de cerner une base solide pour se définir une identité commune, l’impression de quelque chose de dilué risque alors de prendre le pas sur la richesse de la diversité. Notamment, il peut être compliqué pour les nouveaux travailleurs de visualiser les différents aspects de leur travail et de les inclure dans une vision globale du secteur AMO.

De même entre AMO, même si on se reconnaît : « Quand je discute avec un travailleur AMO, j’ai pas l’impression qu’il vient de la planète mars quoi, même s’il n’a pas les mêmes pratiques que moi, il y a des choses quand même communes en termes de valeurs et de fondements », il peut y avoir des difficultés à s’accorder par exemple sur un positionnement inter-service.

  • Vis-à-vis de l’extérieur, on note qu’il serait compliqué pour les autres secteurs d’avoir une vision claire de ce que font et ce que sont les AMO, et ce parfois même vis-à-vis des autres services de l’Aide à la jeunesse. Ce constat est également vrai par rapport aux jeunes et aux familles.

Cette difficulté de définition du secteur AMO nécessite sans cesse un travail de re-clarification et d’explication à tous niveaux.

Dans une logique de secteur qui voudrait pouvoir insuffler des changements sociétaux, il va de soi que la force d’action et d’interpellation sera d’autant plus grande que les AMO seront nombreuses et porteuses d’un positionnement clair.

Cela pose dès lors la question suivante : quels seraient les renoncements nécessaires de chacun, à certains moments, quant à son identité spécifique pour pouvoir réussir dans des combats communs ? Quels modes d’articulation inventer et construire pour pouvoir se reconnaître dans des combats communs et les mener ensemble ?

 

           

 5) Logique de propension

   


On peut rappeler que la logique de propension comme modèle structurant du travail en AMO avait déjà été mis en lumière :

« Il est difficile de ne pas voir que les revendications des AMO à propos de leurs logiques d'action correspondent pratiquement point par point à un modèle de propension : rappelons-nous en effet que dans les rapports d'activités rédigés par ces services en 1995 trois revendications étaient clairement posées : la prise en compte de ce qui existe, la souplesse, la nécessité de considérer le bénéficiaire dans sa globalité.
Lorsque les services revendiquent la prise en compte globale de la situation, ne reconnaissent-ils pas le rôle cardinal de l'interaction et de la polarité dans « la cohérence d'ensemble du devenir » qui y est impliqué ?
S'ils mettent en avant la souplesse nécessaire de la stratégie, n'est-ce pas le mode d'effectuation par adaptation qu'ils évoquent ? Et s'ils prennent appui sur les ressources existantes dans la situation (logique de réseau), c'est bien qu'ils tentent d'exploiter les possibles de la configuration, qu'ils soient d'ailleurs ceux des réseaux personnels et familiaux ou ceux des institutions mobilisées ou mobilisables dans la situation. La désaturation impose aussi que tous les aspects de la vie des personnes ne tombent pas en permanence sous le regard des professionnels. » (Cf. J. Fastrès et J. Blairon, La prévention : un concept en déperdition ?, 2002, Ed Luc Pire, « détournement de fond », p. 136.)

Cette logique de travail va poser les questions de résistances par rapport à un modèle sociétal dominant de type instrumental. On va retrouver des difficultés inhérentes à cette logique d’efficacité dans les différentes missions de l’AMO. (^Consulter : support théorique sur le modèle de propension-.pdf)

Au niveau individuel, les AMO travaillent généralement dans une logique de propension – c'est-à-dire un travail à la demande du jeune/de la famille – à partir de ce qui va émerger au fur et à mesure des rencontres, en s’adaptant au rythme des personnes, etc.

Il est pourtant nécessaire de rester vigilant d’une part vis-à-vis des bénéficiaires eux-mêmes qui parfois ont en tête un modèle de résultats immédiats (on peut penser aux émissions de téléréalité type super-nanny ou le grand frère), d’autre part vis-à-vis d’injonctions et de pratiques à l’œuvre dans d’autres secteurs (le PIIS dans les CPAS pour n’en citer qu’un).

Au niveau du travail communautaire, les questions vont se poser au niveau de la justification, des partenariats, etc.

  • Comment réfléchir sur le modèle propension lorsque le travail doit être justifié sur le mode instrumental ?
  • Comment lutter contre la logique des appels à projet et de la mise en concurrence des services ?
  • Comment travailler en partenariat avec des services dont la logique est celle du modèle instrumental ?
  • Est-il possible (voire nécessaire) d’articuler les deux logiques ? Comment ?

 

           

 6) Engagement politique de l’institution
comme acteur de changement

   


Un travailleur évoque en ces mots le positionnement politique originel des AMO : « A l'origine, c'était aussi pouvoir contribuer à transformer un peu la société, à ce qu'elle fonctionne un peu mieux, à ce qu'elle soit plus équilibrée, qu'elle soit plus juste, qu'il y ait plus de justice ». Le fait que le pouvoir d’intervention donné aux services comprenne l’action communautaire visant à transformer l’environnement des jeunes et des familles sur des éléments manquants ou dysfonctionnels, ainsi que l’interpellation politique afin de mettre en lumière ces manques ou dysfonctionnements nous permettrait d’estimer que l’engagement politique (Nous entendons politique dans son sens général – c’est à dire le projet de société et les valeurs qui sous-tendent la gestion de la cité) est une valeur historique centrale dans les AMO.

Le constat qui est fait à l’heure actuelle concernant le positionnement politique des services aussi bien en interne que vis-à-vis de l’extérieur est une diminution sensible de l’engagement : d'une part, des travailleurs dans une logique militante ; d'autre part, des services dans les revendications et l’interpellation, ainsi que dans le niveau d’ambition des projets communautaires.

Certains revendiquent la nécessité de retravailler et réaffirmer ce positionnement politique.

Les questions suivantes se posent dans ce contexte.

  • Comment transmettre une position de militance au sein d’un service tout en respectant le droit de chacun à ses opinions et en restant dans le cadre d’un contrat de travail ?
  • Comment définit-on le combat ? L'adversaire ? Les alliés ?
  • Quelles stratégies doit-on adopter actuellement pour espérer jouer réellement ce rôle d’acteur de changement ? La lutte, l’infiltration, la « contamination », le compromis, autres ?
  • Comment fait-on cause commune avec d’autres acteurs ?

 

           

 7) Autonomie et indépendance des services

   


La position des AMO comme acteurs de changements et révélateurs de dysfonctionnements ne pourrait être assurée que si celles-ci bénéficient d’une indépendance (non ingérence et non instrumentalisation par un pouvoir quel qu’il soit), et d’une autonomie, notamment en matière de méthodologie, mais également à un niveau financier (^Consulter : la charte associative-.pdf).

Les AMO étant des associations subsidiées, la question de l’autonomie et de l’indépendance qui s’est toujours posée porte :

  •  d’une part, sur les relations avec le pouvoir subsidiant (quel juste contrôle doit être exercé pour vérifier que l’argent public est correctement utilisé ? Comment garantit-on la liberté méthodologique ? Etc.) ;
  •  d’autre part, sur le fonctionnement interne à l’institution, entre équipe, direction et conseil d’administration/pouvoir organisateur (comment assurer une participation aux décisions, alimenter les instances, traiter avec elles les enjeux, etc.).

Un autre élément pose question également, il s’agit des partenariats, notamment dans le cadre de travail avec des pouvoirs locaux.

  •  Comment gérer l’avancement de projets avec des partenaires qui n’auront pas toujours les mêmes missions, les mêmes enjeux, les mêmes cadres de références (légales ou autres) ?
  •  Comment établir des collaborations positives, au bénéfice des jeunes et des familles sans être instrumentalisés dans un système qui nous pose question ?

Et pour finir, dans un contexte où les moyens financiers sont parfois faibles, une logique de plus en plus répandue est celle des appels à projets, de tous types et de tous horizons. Cette logique pousse à une mise en concurrence des services entre eux, mais peut également être porteuse d’une idéologie de type caritatif ou mécénat.

Il est donc certainement important de réfléchir aux questions suivantes.

  •  A quel type d’instrumentalisation pourrait-on avoir affaire par rapport à ces appels à projet divers ? Sont-ils tous de même nature ?
  •  Que cautionne-t-on en y participant ?
  •  A-t-on encore le choix de ne pas le faire ? Quelle serait l’alternative ?


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 Pour ne pas conclure...

   


Nous avons dit que le processus entamé ne se voulait pas terminé.

A l’heure où des AMO ont souhaité s’arrêter pour faire le point sur ce qu’elles sont et ce qu’elles veulent, et, d’autre part, s’assurer que des échanges entre générations de travailleurs et de services permettent d’élaborer un regard commun sur l’histoire et les enjeux du présent, nous ne pouvions que déboucher sur des questions stratégiques telles qu’elles viennent d’être relatées.

La suite du processus se jouera dans l’appropriation de ces questions, sur les réponses qui y seront apportées par les uns et par les autres, et peut-être surtout sur les échanges qui pourront porter sur ces réponses éminemment politiques.

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